Les élections législatives anticipées du 18 mai 2025 au Portugal ont marqué un tournant politique majeur, sur fond de scandales de corruption qui ont ébranlé la confiance des citoyens dans les institutions.
Résultats électoraux et recomposition politique
La coalition de centre-droit Alliance démocratique (AD), dirigée par le Premier ministre sortant Luís Montenegro, a remporté le scrutin avec 89 sièges sur 230, soit 32,7 % des voix, sans toutefois atteindre la majorité absolue fixée à 116 sièges.
Le Parti socialiste (PS) a subi une défaite historique, perdant 20 sièges et tombant à 58 députés, égalant le score du parti d’extrême droite Chega, qui a réalisé une percée spectaculaire avec 22,6 % des voix.
Ce scrutin a mis fin à un bipartisme vieux de 50 ans, instaurant une nouvelle ère de fragmentation politique.
Des figures politiques au cœur des scandales
- António Costa, ancien Premier ministre, a démissionné en novembre 2023 suite à l’Opération Influencer, une enquête portant sur des concessions minières de lithium et des projets énergétiques. Bien que non inculpé, sa démission a provoqué une crise politique majeure.
- José Sócrates, Premier ministre de 2005 à 2011, est accusé d’avoir détourné environ 34 millions d’euros via des actes de corruption, fraude et blanchiment d’argent. Il est actuellement en attente de procès.
- Manuel Pinho, ancien ministre de l’Économie, a été condamné en 2024 à dix ans de prison pour corruption passive et blanchiment d’argent, ayant reçu des paiements occultes de la part de Ricardo Salgado, ancien dirigeant du groupe Espírito Santo.
- Fernando Medina, ancien maire de Lisbonne et actuel ministre des Finances, est impliqué dans le scandale Tutti Frutti, une affaire de trafic d’influence entre le Parti socialiste et le Parti social-démocrate lors des élections municipales de 2017.
Une justice en quête de crédibilité
La magistrature n’est pas épargnée par les soupçons de corruption. Henrique Araújo, président de la Cour suprême de justice, a dénoncé publiquement la corruption généralisée et le manque d’indépendance du pouvoir judiciaire, appelant à des réformes urgentes, notamment la création du délit d’enrichissement illicite.
Des cas de juges bénéficiant de pardons controversés ont également été signalés, sapant la confiance du public dans le système judiciaire. Près de la moitié des citoyens portugais estiment que la corruption est répandue au sein des tribunaux.
Vers une réforme anti-corruption
Face à cette situation, le gouvernement portugais a approuvé en juin 2024 des mesures renforcées contre la corruption, permettant notamment la confiscation des biens des suspects sans condamnation pénale préalable. Cette initiative vise à restaurer la confiance du public, alors que 93 % des citoyens perçoivent la corruption comme un problème généralisé.
Cependant, ces mesures suscitent des débats sur le respect des droits fondamentaux, notamment la présomption d’innocence et le droit à la propriété privée.
Le Portugal est à un tournant décisif dans sa lutte contre la corruption. Les récentes affaires mettent en évidence la nécessité d’une réforme en profondeur du système judiciaire et d’une volonté politique forte pour restaurer la confiance des citoyens.